Droit au compte bancaire : la banque peut-elle refuser une ouverture de compte ?

Une banque vient de refuser l’ouverture d’un compte bancaire à une personne. Ces situations peuvent se présenter mais sont-elles légales ? Une banque peut-elle légitimement refuser de d’ouvrir un compte à une personne ? De quels recours dispose-t-elle ? Quelles démarches pour faire valoir son droit au compte ?

Droit au compte bancaire : qui peut en bénéficier ?

Depuis 1984, la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit reconnaît aux citoyens un droit au compte bancaire. Ce droit est consacré aujourd’hui à l’article L. 312-1 du Code monétaire et financier qui dispose que toute personne physique ou morale domiciliée en France « a droit à l’ouverture d’un compte de dépôt dans l’établissement de crédit de son choix » . Ce droit est bien entendu gratuit.

Tout personne a le droit à l’ouverture de ce compte si elle est :
- une personne physique ou morale résidant en France ;
- une personne physique résidant légalement dans un pays de l’Union Européenne ;
- une personne physique de nationalité française résidant hors de France.

Ce droit au compte bancaire est donc accordé aux personnes physiques mais aussi aux entreprises et associations sous certaines conditions.

Droit au compte mais possibilité de refuser l’ouverture d’un compte bancaire ?

S’il existe bel et bien un droit à l’ouverture d’un compte bancaire, les banques peuvent cependant légitimement refuser d’ouvrir un compte au nom d’une personne.

Les banques n’ont pas à justifier leur décision de refus mais doivent, selon ce même article L. 312-1 du Code monétaire et financier précité, fournir à la personne refusée une attestation de refus d’ouverture de compte. Cette attestation permet à celle-ci par la suite de faire valoir son droit au compte.

En général, ce refus d’ouverture de compte est lié à l’existence d’interdits bancaires, à l’émission de chèques sans provision, à une situation de surendettement etc.

Refus d’ouverture d’un compte bancaire : que faire ?

En cas de refus de la part d’une banque, la personne concernée peut agir pour faire valoir ses droits. En effet, elle peut exercer un recours auprès de la Banque de France.

Avec ce recours, la Banque de France peut contraindre une banque à accepter l’ouverture d’un compte.

Elle peut adresser elle-même ce recours soit par courrier directement auprès de la Banque de France, soit en vous déplaçant auprès d’une succursale de celle-ci.

En outre, la banque qui a refusé l’ouverture d’un compte peut effectuer cette démarche pour la personne concernée si elle lui en fait la demande.

Pour que le dossier soit accepté, il doit contenir différentes pièces justificatives : le formulaire de demande de droit au compte, l’attestation de refus, un justificatif de domicile.

La banque désignée par la Banque de France pour ouvrir un compte bancaire ne peut pas refuser

Celle-ci doit ouvrir au client concerné un compte dans un délai de 3 jours, peu importe que ce dernier soit interdit bancaire, en situation de surendettement ou encore inscrit au fichier des incidents de crédit aux particuliers.

Droit au compte : quels sont les services bancaires associés ?

L’ouverture d’un compte bancaire est assortie d’une multitude de services bancaires.

Prévus aux articles D. 312-5-1 et D. 312-6 du Code monétaire et financier, ces services doivent être fournis gratuitement par l’établissement de crédit.

Il peut s’agir notamment de l’encaissement de chèques, de l’exécution de virements bancaires, des dépôts d’espèces, etc.

Texte de l’article D. 312—1 du Code monétaire et financier résultant de l’article 21 du décret n° 2018-229 du 30 mars 2018 relatif à la dématérialisation des relations contractuelles dans le secteur financier :

« Les prestations de base mentionnées au II de l’article L. 312-1 comprennent :
1° L’ouverture, la tenue et la clôture du compte ;
2° Un changement d’adresse par an ;
3° La délivrance à la demande de relevés d’identité bancaire ;
4° La domiciliation de virements bancaires ;
5° La fourniture mensuelle d’un relevé des opérations effectuées sur le compte ;
6° L’encaissement de chèques et de virements bancaires ;
7° Les paiements par prélèvements SEPA, titre interbancaire de paiement SEPA ou par virement bancaire SEPA, ce dernier pouvant être réalisé aux guichets ou à distance ;
8° Des moyens de consultation à distance du solde du compte ;
9° Les dépôts et les retraits d’espèces au guichet ou aux distributeurs automatiques de l’organisme teneur de compte ;
10° Une carte de paiement permettant notamment le paiement d’opérations sur internet et le retrait d’espèces dans l’Union européenne. »

Texte de l’article D. 312-6 du Code monétaire et financier résultant de l’article 5 du décret n° 2018-229 du 30 mars 2018 relatif à la dématérialisation des relations contractuelles dans le secteur financier :

« Toute personne physique ou morale mentionnée au I de l’article L. 312-1 ayant ouvert un compte de dépôt auprès d’un établissement désigné selon la procédure définie au III de ce même article peut bénéficier des services bancaires mentionnés à l’article D. 312-5-1 sans contrepartie contributive de sa part. »

Bon à savoir.

En cas de refus de la part d’une banque, la personne concernée peut notamment se faire aider par sa caisse d’allocations familiales ou par une association de consommateurs agréée. Le compte bancaire ouvert suite à un recours auprès de la Banque de France peut ensuite être fermé comme n’importe quel autre compte bancaire. Attention, la banque doit cependant motiver sa décision de fermeture et vous laisser un préavis.

Patrick Lingibé
Vice-Président de la Conférence dès Batonniers de France
Ancien membre du Conseil national des barreaux
Bâtonnier
Spécialiste en droit public
Diplômé en droit routier
Médiateur Professionnel
Membre du réseau EUROJURIS
Membre de l’Association des Juristes en Droit des Outre-Mer (AJDOM)
SELARL JURISGUYANE
www.jurisguyane.com