Faire face aux contrôle de l’administration économique.

L’Administration économique (DGCCRF ou DIRECCTE en régions) est dotée de pouvoirs d’enquêtes pour contrôler la conformité des pratiques des entreprises au droit de la concurrence et au droit de la consommation.
Au regard du nombre d’enquêtes (550.000 vérifications en 2017) et des sanctions encourues en cas d’infraction constatée – dont le quantum accroît régulièrement à l’initiative du législateur –, il appartient aux entreprises d’anticiper et de gérer ces contrôles.
Cela implique pour elles d’identifier, d’abord, les dispositifs pouvant faire l’objet d’enquêtes (1.), ensuite, les pouvoirs de l’Administration lors de ces enquêtes (2.), enfin, les suites précontentieuses ou contentieuses susceptibles d’être données à ces enquêtes (3.). 

1. Les dispositifs invocables.

Les contrôles de l’Administration économique peuvent porter sur de nombreux dispositifs issus notamment du Code de commerce : droit des pratiques anticoncurrentielles (ententes illicites, abus de position dominante, micro pratiques anticoncurrentielles), règles relatives à la transparence (facture, conditions générales de vente, convention récapitulative, délais de paiement), droit des pratiques restrictives de concurrence (prix minimum imposés, revente à perte, déséquilibres significatifs dans les droits et obligations des parties…), ou du Code de la consommation : règles relatives à l’information du consommateur, clauses abusives, droit des pratiques commerciales déloyales (pratiques commerciales trompeuses ou agressives), règles relatives à la sécurité et à la conformité des produits et des
services… 

Selon les dispositifs, les sanctions encourues peuvent être de nature pénale, civile ou administrative. A titre d’illustration, en matière de transparence, la majorité des manquements est désormais sanctionné par des amendes administratives.
S’agissant des pratiques restrictives de concurrence, celles visées à l’article L. 442-6 du Code de commerce (obtention d’un avantage manifestement disproportionné, déséquilibres significatifs dans les droits et obligations des parties…) sont sanctionnées par une amende civile, d’un montant de 5 millions d’euros, pouvant être portée au triple du montant des sommes indûment versées ou, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d’affaires hors taxe réalisé annuellement en France par l’auteur de la pratique.
Celles visées aux articles L. 442-2 (revente à perte) et L. 442-5 (prix minimum imposés) du Code de commerce sont, en revanche, sanctionnées par des amendes pénales. 

2. Les pouvoirs de l’Administration.

Schématiquement, les agents de l’Administration économique peuvent intervenir dans le cadre d’enquêtes dites « simples » ou « lourdes ».

Dans le cadre d’enquêtes « simples », les agents peuvent pénétrer entre 8 h et 20 h dans tous lieux utilisés à des fins professionnelles ou, en dehors de ces heures, dans tous lieux ouverts au public ou à l’intérieur desquels sont en cours des activités de production, de fabrication, de transformation, de conditionnement, de transport ou de commercialisation. Les agents peuvent notamment exiger la communication des livres, factures et autres documents professionnels de toute nature, et recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement, document ou toute justification nécessaire au contrôle. 

Dans le cadre d’enquêtes « lourdes », les pouvoirs des agents sont renforcés, ces derniers procédant à des opérations de visite et saisie sur ordonnance d’autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD). Lors de ces opérations, qui ne peuvent commencer avant 6 h ou après 21 h, les agents, assistés d’officiers de police judiciaire, peuvent procéder à des saisies de documents et de tout support d’information, ainsi qu’à la pose de scellés sur tous locaux commerciaux, documents et supports d’information dans la limite de la durée de la visite des locaux.

3. Les suites précontentieuses ou contentieuses.

Lorsque des infractions ont été constatées, l’Administration économique est susceptible de donner plusieurs suites à ses enquêtes, dites « pédagogiques », « correctives » ou « répressives ».

Les suites « pédagogiques » prendront la forme d’avertissements, formulés en dehors de tout véritable cadre légal. Les suites « correctives » prendront la forme d’injonctions de se conformer à ses obligations ou de cesser tout agissement illicite dans un certain délai. L’entreprise qui n’a pas déféré à une injonction lui ayant été notifiée encourt le prononcé d’une amende administrative lorsqu’il s’agit d’une infraction ou d’un manquement passible d’une amende administrative ou pénale. 

Quant aux suites « répressives », elles prendront la forme d’actions en justice et emprunteront la voie administrative, pénale ou civile ou commerciale en fonction de la qualification, administrative, pénale ou civile du manquement reproché. Les règles de procédure classiques seront alors applicables, moyennent quelques aménagements. S’agissant des pratiques restrictives de concurrence, ces aménagements tiennent, par exemple, à la faculté dont dispose le ministre de l’Economie pour initier l’action et à la compétence de juridictions spécialisées en matière civile et commerciale.

Les décisions correctives et répressives de l’Administration doivent être précédées d’une procédure contradictoire préalable, au terme de laquelle les entreprises peuvent faire valoir leurs observations écrites ou orales. Ces décisions doivent en outre être motivées par l’Administration en fait et en droit.

Enfin, les entreprises veilleront à être vigilantes sur les délais de contestation des mesures administratives prises à leur encontre, lesquelles peuvent faire l’objet d’un recours gracieux (devant l’Administration économique concernée) ou contentieux (devant le tribunal administratif) dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision.

Ombeline Soulier Dugénie,
Avocat Associé
Droit et contentieux public

Régis Pihery,
Avocat associé
Droit et contentieux économique.

Article initialement publié dans le Journal du Management Juridique n°63.

Rédaction du site des Experts de l’entreprise.