L’assurance responsabilité civile des mandataires sociaux.

Selon une étude d’Opinion Way [1] , 75 % des dirigeants d’entreprises présument que le statut de leur entreprise protège leur patrimoine personnel. Or, il n’en est rien : les dirigeants d’entreprises sont de plus en plus amenés à être personnellement mis en cause dans le cadre de leur activité, pour des fautes que la justice considère comme séparable des fonctions, et pour lesquelles l’entreprise ne peut les soutenir financièrement. L’assurance Responsabilité Civile des Mandataires Sociaux propose de répondre à cette situation.

« Les cas les plus fréquents que nous rencontrons, explique Ludivine Deschamps, responsable du pôle RCMS chez le courtier en assurances Ofracar, portent sur des recours pour manquement aux obligations légales en matière de sécurité au travail, pour du harcèlement et pour du comblement de passif… et la plupart du temps, les plaignants sont des salariés, actuels ou anciens, et/où la sécurité sociale et l’inspection du travail  ».

Mais les motifs de poursuites sont encore plus variés : faute de gestion ; non-respect des statuts de l’entreprise ou de toute disposition légale ou réglementaire ; fusions et acquisitions ; discrimination à l’embauche ; responsabilité environnementale… Et parmi les parties qui lancent les poursuites, on trouve donc les salariés et les administrations, mais aussi des créanciers s’estimant lésés par une dépense, jugée inutilement onéreuse, réalisée peu de temps avant le dépôt de bilan, et qui lancent alors une action en comblement de passif ; ou bien des actionnaires qui se retournent contre le dirigeant ou l’ex-dirigeant, soit pour des opérations qui ont amené des pertes majeures, soit parce que la responsabilité de l’entreprise a été reconnue au pénal.

Par ailleurs, cette question de la faute séparable des fonctions ne se réduit pas aux dirigeants de droit : dans toute situation où la justice peut reconnaître une faute, la tendance consiste à aller rechercher la personne responsable de la décision qui est considérée comme à l’origine du problème. Si le chef comptable ou la responsable du planning sont à l'origine de la situation litigieuse, ce sont eux qui seront poursuivis.

Le risque est d’autant plus grand que chacun de ces chefs d’accusation peut être mobilisé pour ce qui n’est au départ qu’une simple omission, une déclaration inexacte ou une négligence. Il s’agit là d’une tendance de fond, d’origine anglo-saxonne, qui se multiplie depuis une dizaine d’années dans les juridictions françaises et qui accompagne la judiciarisation des relations au sein du monde de l’entreprise.

Il est alors bien utile pour la personne mise en cause de bénéficier d’une couverture adaptée, car ces situations peuvent engendrer des dépenses très importantes, par les frais de justice, mais également par les dommages et intérêts pouvant être prononcés. Les sommes en question dépassent souvent les actifs personnels, et la personne poursuivie risque alors de tout perdre.

Ce que les compagnies d’assurances proposent

Les assurances dites « Responsabilité Civile des Mandataires Sociaux » (RCMS) se proposent de répondre à ce risque. Étant donné les enjeux financiers et la multiplication des procès, il est même étonnant que cela n’ait rien d’obligatoire. « Nous le proposons désormais dès que nous faisons une analyse de risques, et nous le conseillons parmi les polices prioritaires » souligne Ludivine Deschamps, car les nouvelles contraintes légales et réglementaires rendent toujours plus probable la possibilité de commettre une faute. Or, une entreprise se rendrait coupable d’abus de biens sociaux en soutenant financièrement un de ses dirigeants alors qu’il est poursuivi pour une faute séparable de ses fonctions.

Les garanties RCMS permettent donc de garantir l’ensemble des dirigeants de droit ou « de fait » pour leurs frais de justice au civil et au pénal, et pour les dommages et intérêts qui seraient prononcés. De plus, pour répondre aux situations réelles, de nouvelles garanties apparaissent : la nomination de mandataires ad hoc au moment de difficultés financières, ou encore l’atteinte à la réputation et à l’e-réputation. La principale limite de la couverture RCMS reste géographique, car il est exceptionnel que les pays de common law soient inclus dans la formule de base, étant donné les montants en jeu lors de procès dans ces pays.

Le développement de cette police sur ces dernières années est marqué, et il a un double effet : il a rendu possible une baisse de l’ordre d’un tiers du montant des primes depuis une dizaine d’années, et il a également créé un effet d’aubaine pour les créanciers qui savent que cette couverture rend les dirigeants solvables en cas de poursuites. Une double raison de prendre contact avec son partenaire en contrat d’assurances.

Jordan Belgrave

« Article initialement publié dans le JMJ n°53 »

Notes

[1Etude publiée en avril 2015 et menée auprès de 306 dirigeants de TPE-PME.