Un audit, c’est le recensement et l’analyse de tous les droits de propriété intellectuelle (D.P.I.) d’une entreprise et de tous les éléments qui y sont liés (contrats, procédures, stratégies…).
Il s’agit alors de distinguer ce qui relève de la propriété littéraire et artistique, c’est-à- dire les droits d’auteur et les droits voisins, de la propriété industrielle, à savoir les marques, les brevets, les dessins et modèles, les appellations d’origine, les secrets de fabrique…
Car les recherches et le contrôle à effectuer varient d’un droit à l’autre : les formalités à accomplir, la durée de protection, l’étendue des droits ne sont pas les mêmes. Il est donc fondamental d’examiner chacun des droits qui composent le patrimoine immatériel de l’entreprise.
Et ce pour plusieurs raisons : mieux gérer et protéger mais aussi valoriser et développer.
A l’heure du digital où toute la propriété intellectuelle se crée, se trouve ou s’expose sur le net, il est encore plus important de prêter attention à ces droits.
En quoi consiste un audit ?
L’audit des DPI consiste à examiner avec précision :
le champ d’application et la validité des DPI. Pour cela, il faut reprendre toutes les formalités effectuées ou en cours en cas de dépôt, quand il s’agit de droits de propriété industrielle. Quels qu’ils soient, c’est leur étendue géographique et le niveau de la protection qui sont en question. Pour la marque, par exemple, le nom et/ou le signe choisi n’est protégé que pour la ou les activités pour lesquelles il est déposé et exploité, mais aussi dans les pays dans lesquels il est déposé. Pour le droit d’auteur et les droits voisins, les choses sont plus complexes car il n’y a pas de système de dépôt. Mais surtout, avec Internet et les technologies de l’information et de la communication, il devient de plus en plus difficile de savoir si les créations sont totalement originales et de connaître l’étendue de la protection géographique de tel ou tel droit.
les coûts issus de la gestion des DPI. Les droits qui nécessitent des formalités ont un coût qui, suivant l’étendue de leur protection, peuvent s’avérer plus ou moins onéreux. Aussi, si une entreprise est par exemple titulaire de beaucoup de marques et/ ou qu’elles ont été déposées dans de nombreux pays, il faut vérifier qu’elles sont toutes exploitées et que les renouvellements ont bien été réalisés. Les coûts peuvent aussi être liés à l’acquisition d’une licence d’exploitation.
les contrats attachés aux DPI conclus par l’entreprise avec des tiers pour leur exploitation : licence, franchise, accords divers, etc.
les procédures en cours et les frais engendrés par celles-ci (procédure d’opposition, contentieux en cas de contrefaçon ou de concurrence déloyale par exemple).
les contrats des salariés à l’origine des créations ou des inventions de l’entreprise.
les stratégies éventuelles de gestion des DPI.
Pourquoi recourir à un audit ?
Parce qu’ils ont une valeur souvent sous-estimée, ils sont généralement négligés. Pourtant, un audit de propriété intellectuelle peut s’avérer indispensable à bien des égards dans plusieurs situations.
Quand l’entreprise souhaite intégrer sa propriété intellectuelle dans la stratégie de développement de l’entreprise, elle doit connaître les risques, les coûts, les bénéfices mais aussi le potentiel offert par les DPI.
Il en va de même quand elle a pour projet l’acquisition d’une entreprise. Dans ce cas, elle doit aussi vérifier que celle-ci est bien titulaire de tous les droits nécessaires à l’exploitation de l’activité.
Quand l’entreprise souhaite céder une partie de son activité ou son activité, elle doit pouvoir évaluer le montant des DPI.
Quand l’entreprise souhaite exploiter des DPI qui ne lui appartiennent pas ou quand elle souhaite consentir à leur exploitation par des tiers.
Mais que l’entreprise ait des projets ou non, il semble impensable aujourd’hui de ne pas être au point sur les questions de propriété intellectuelle. Ceux-ci peuvent avoir une valeur pécuniaire importante qui contribue à la valorisation d’une entreprise.
Attention cependant, les compétences en interne ne sont pas toujours suffisantes pour mener un audit à bien, et ce surtout quand l’entreprise ne dispose pas de juristes spécialisés. Il peut alors être intéressant de recourir à un cabinet d’avocats spécialisé en propriété intellectuelle ou à un cabinet de conseils en propriété industrielle quand il s’agit de brevets et que des compétences techniques sont requises pour étudier correctement les tenants et les aboutissants d’un tel droit.
Quels sont les bénéfices de l’audit ?
L’audit est donc de plus en plus plébiscité pour les bénéfices qu’il apporte au développement de l’activité de l’entreprise.
Il permet aussi bien d’améliorer la protection du patrimoine immatériel que d’optimiser la gestion de ce dernier en limitant les risques qui y sont liés : risque social quand ils sont issus de créations ou d’inventions réalisées par des salariés, risque de contrefaçon ou d’exploitation illicite par des tiers… Suite à un audit, l’entreprise pourra par exemple décider de mettre en place des procédures internes, de se doter d’un logiciel spécifique ou encore d’élaborer des contrats types. Utiliser les droits de façon pertinente, mieux exploiter ceux qui rapportent et abandonner ceux qui ne sont pas exploités ou rapportent peu, et donc optimiser le coût de gestion du portefeuille de droit est un des autres atouts de l’audit.
Mais c’est aussi un outil de valorisation de la propriété intellectuelle, en la faisant apparaître dans le bilan comptable de l’entreprise. La valeur et les coûts qui en sont issus étant connus, les actifs peuvent augmenter, un certain nombre de dépenses peuvent être passées en immobilisation plutôt qu’en charge et ainsi le bénéfice de la société peut être plus élevé.
Quand les DPI sont nombreux, il peut aussi aider à définir tant une stratégie de protection qu’une stratégie contentieuse en cas d’atteinte. On pense ici à des marques ou des produits populaires souvent exploités illicitement ou contrefaits.
Le caractère indispensable d’un audit de propriété intellectuelle n’est plus à démontrer et toutes les entreprises devraient s’y intéresser. Mais au-delà des DPI énumérés ici, il ne faut pas négliger les noms de domaine de l’entreprise. Immatériels mais exclus du droit de la propriété intellectuelle, ces derniers représentent de plus en plus un actif de valeur, et ce même si l’entreprise n’en est pas la propriétaire à proprement parler. Un droit de plus à étudier de près…
Laurine Tavitian
« Article initialement publié dans le JMJ n°53 ».