La révolution numérique a vocation à transformer l’ensemble des secteurs de l’économie traditionnelle. Face à cette transformation le modèle émergeant des Marketplace est sujet à de nombreuses tentatives de régulation.
Mais lesquelles sont fructueuses ?
Contrôler la déclaration des revenus perçus par les annonceurs sur les Marketplace s’avère être un véritable parcours du combattant pour le gouvernement. Il s’était résigné par exemple à obliger simplement les plateformes telles qu’Uber et Airbnb à informer les chauffeurs VTC ou les loueurs sur les démarches fiscales à effectuer.
Or c’est dans un secteur particulier que le gouvernement a décidé de tenter un nouveau moyen de régulation qui semble porter ses fruits : la vente d’animaux en ligne.
Avec quasiment un animal de compagnie par habitant en France, le secteur de l’animalerie représente aujourd’hui 4,9 milliards d’euros. En 2015, 80% des ventes des animaux les plus populaires, à savoir les chiens et les chats, étaient réalisées sur le net, Leboncoin étant de loin la première animalerie de France avec 80.000 ventes par an.
1/ Retour sur le système mis en place par le gouvernement pour réguler les ventes en ligne.
A/ Exposé du système
L’ordonnance du 7 octobre 2015 prise par le gouvernement impose depuis le 1er janvier 2016 à tout vendeur professionnel ou particulier d’animaux de s’immatriculer au registre du commerce et de se doter d’un numéro SIREN (Système d’identification du répertoire des entreprises) pour poster une annonce onéreuse.
Céder son animal ne relève pas en principe d’une activité professionnelle.
Le gouvernement procède par extension en affirmant que l’ordonnance est applicable à « toute personne exerçant l’activité d’élevage de chiens ou de chats ».
Cette ordonnance vient ainsi dans le prolongement redéfinir la notion d’élevage : « On entend par élevage de chiens ou de chats l’activité consistant à détenir au moins une femelle reproductrice dont au moins un chien ou un chat est cédé à titre onéreux ».
Dès lors en redéfinissant la notion d’élevage une assimilation est opérée entre un professionnel qui en fait son métier et un particulier qui cède le fruit de la portée de sa femelle reproductrice.
B/ Sanction
Le gouvernement a décidé de faire peser la sanction non pas sur la plateforme mais sur le vendeur. Ainsi, le vendeur même non professionnel risque 7.500 euros d’amende en cas d’absence de numéro Siren et 750 euros en cas de non-respect des mentions obligatoires sur les annonces.
2/ Analyse de l’impact de l’obligation d’immatriculation sur le marché.
A/ La réduction du nombre d’annonces.
Concrètement l’initiative du gouvernement a porté ses fruits en ce qu’elle a permis la baisse des annonces et le renforcement du marché professionnel. Depuis le 1er janvier 2016, tous les mois la plateforme Leboncoin voit ses annonces de ventes d’animaux chuter de 30% en moyenne.
Un bon moyen de réguler le marché à tel point que les gouvernements belge, espagnol et canadien pensent à appliquer le même système.
Un tel système pourrait-il être étendu à d’autres secteurs d’activité des places de marché ?
Le marché de la vente d’animaux soulève la question du bon traitement d’êtres vivants et de facto fait apparaitre un intérêt d’ordre public qui nécessite une protection renforcée et se matérialise par la confusion entre particuliers et professionnels.
Pour autant certains secteurs soulèvent des problématiques d’ordre public. C’est notamment le cas du logement qui, depuis l’arrivée d’Airbnb, connait une raréfaction dans certaines zones et des abus de la part des loueurs (sous-location sans autorisation, non déclaration des revenus, location de logements non décents).
Obliger les annonceurs d’Airbnb à s’immatriculer pourrait faire baisser le nombre d’annonces et renforcer le marché professionnel sur le même modèle que l’animalerie en ligne. Rappelons notamment qu’à Paris la moyenne de nuits réservées est de 4,2 dans un logement Airbnb, et n’est que de 2,3 dans un hôtel.
B/ La limite : le contournement du dispositif.
Tout marché au sein de l’économie numérique s’adapte dans les contours de la loi. Selon les professionnels, la régulation a eu un effet au départ mais les parades se sont vite imposées. Parmi certaines d’entre elles, la possibilité pour les annonceurs de cocher la case « don » et de ne pas être soumis à l’obligation d’enregistrement qui leur permet ensuite de négocier un prix directement avec les intéressés.
Ce type de dévoiement nuit au fonctionnement des différentes Marketplaces en faussant la rencontre des volontés et la principale difficulté pèse désormais sur les opérateurs, leur e-réputation étant en jeu.
Dédiant un pôle de son activité à l’accompagnement des Marketplace, le cabinet Haas traite aussi des problématiques d’e-réputation et des moyens pour renforcer la confiance de sa clientèle numérique.
Gérard Haas,
et Jordan Rhoum.