Si l’interrogation est connue, la réponse est délicate.
Le dirigeant de la société doit ainsi choisir entre le statut de mandataire social, celui de salarié voire décider de cumuler les deux statuts.
1. Le statut de mandataire social.
Le dirigeant mandataire social représente la société. Il l’engage par ses actes générateurs de sa responsabilité en sa qualité de dirigeant.
Il est mentionné dans le registre du commerce et des sociétés et est pleinement responsable de ses actes de gestion.
Le cadre juridique régissant le mandataire social relève du code du commerce. Il n’existe pas de lien de subordination avec la société ce qui exclut l’application du code du travail.
Il en découle une très grande souplesse pour la définition des pouvoirs du dirigeant mandataire social mais aussi une facilité pour révoquer le mandataire social de son mandat.
L’abus est la seule limite au pouvoir de révocation dont disposent les associés à l’égard du dirigeant mandataire social.
Il convient de distinguer la révocation ad nutum qui peut intervenir à tout moment et sans motivation particulière de la révocation pour juste motif.
Le premier cas de figure concerne les présidents et directeurs généraux des sociétés anonymes, les dirigeants des sociétés par actions simplifiées et ceux des sociétés en commandite par actions dont les statuts le prévoient.
La seconde hypothèse concerne les gérants de sociétés en nom collectif, de sociétés à responsabilité limitée et de sociétés en commandite simple ainsi que des directeurs généraux des sociétés anonymes, des directeurs généraux délégués ainsi que des membres du directoire de ces mêmes sociétés.
La précarité du dirigeant mandataire social amène ce dernier à négocier régulièrement des dispositions protectrices comme un parachute prévoyant des indemnités en cas de départ et/ou une couverture chômage privée.
2. Le statut de salarié.
Le dirigeant salarié n’a pas cette préoccupation. Il agit dans le cadre d’un contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail et au contrôle de son employeur auquel il est tenu par un lien de subordination.
Il n’apparaît pas au registre du commerce et des sociétés et agit sous la responsabilité de son employeur qui peut le sanctionner en cas de manquement à ses obligations relevant de son contrat de travail.
Toutefois s’il est un salarié soumis aux dispositions du code du travail, le législateur a tenu compte de la nécessaire autonomie indispensable aux fonctions de dirigeant, l’excluant de règles applicables à la durée du travail.
L’article L 3111-2 du code du travail prévoit que le cadre dirigeant exerce des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps, est habilité à prendre des décisions de façon largement autonome et perçoit une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l’entreprise.
Le statut de salarié confère au dirigeant salarié une protection plus importante que celle du dirigeant mandataire social.
Il en est ainsi si l’employeur veut mettre un terme à son contrat. La procédure de licenciement doit être respectée avec la convocation à un entretien préalable obligatoire avant l’envoi d’une lettre de licenciement qui doit prévoir à minima une cause réelle et sérieuse pour mettre fin au contrat de travail.
Les indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles seront alors versées au dirigeant salarié.
3. Le cumul des deux statuts.
Certaines situations sont plus complexes. Il peut arriver que le dirigeant cumule avec son mandat social un contrat de travail.
Il relève alors du droit des sociétés pour son mandat et du droit du travail pour son contrat.
Pour qu’un tel cumul soit autorisé, plusieurs conditions doivent être réunies pour avérer que le contrat de travail corresponde bien à une activité effective.
Il doit être caractérisé une fonction technique distincte de la fonction de direction donnant lieu à une rémunération au titre du contrat de travail dans le cadre d’un lien de subordination avec l’employeur.
La jurisprudence est toutefois rigoureuse dans les petites entreprises où il est délicat de distinguer les fonctions techniques des fonctions de direction.
Le cumul des deux statuts doit donc reposer sur une réalité et ne pas revêtir de caractère frauduleux pour contourner le statut du dirigeant mandataire social, ce qui peut être relevé en cas de contrat de travail signé après une nomination en qualité de mandataire social.
Le contrat de travail doit reposer sur une véritable qualification professionnelle.
4. Le casse-tête de la protection sociale.
Certains dirigeants à condition qu’ils soient rémunérés, sont affiliés au régime général de la sécurité sociale dans les mêmes conditions que les salariés, exception faite de l’assurance chômage.
C’est le cas des présidents, directeurs généraux, directeurs généraux délégués et membres du directoire des SA, des présidents et dirigeants statutaires des SAS, qu’ils soient associés majoritaires ou minoritaires ou non associés, des gérants associés (minoritaires ou égalitaires) ou non associés des SARL ainsi que le gérant non associé des SNC, SCS et SCA.
A l’inverse, d’autres dirigeants sont affiliés au régime social des indépendants (RSI) soumis ces derniers temps à une forte critique.
Il en est ainsi des gérants associés majoritaires de SARL et des gérants associés des SNC, des SCS ou des SCA.
En l’absence de contrat de travail, les dirigeants ne sont pas éligibles à l’assurance chômage en cas de révocation.
En cas de cumul, leur droit à assurance chômage dépendra de l’étude qui sera faite par Pôle Emploi sur la réalité de l’accomplissement d’une fonction technique distincte de la fonction de direction.
Il sera judicieux pour le dirigeant en cas de cumul d’interroger préalablement Pôle Emploi pour qu’il rende un avis sur l’existence d’un emploi salarié effectif.
En cas d’avis négatif, le dirigeant pourra opter pour une assurance volontaire.
5. Quel statut adopter ?
La conjoncture économique a bouleversé la notion de dirigeant.
Autrefois, le dirigeant mandataire social, représentant de la société, n’était mu que par sa volonté d’autonomie, d’indépendance, peu importait s’il était soumis à une révocation facilitée.
Les difficultés économiques, le nombre de dépôt de bilans, les situations dramatiques vécues à titre personnel par certains dirigeants de TPE et PME, ont conduit à la recherche d’une meilleure protection, qui peut être trouvée à travers le statut salarié.
De nombreux dirigeants voient leur carrière suivre des allers-retours entre les différents statuts au gré de leurs expériences professionnelles.
Le Conseil de prud’hommes est régulièrement saisi par des dirigeants qui demandent une requalification en contrat de travail de leur mandat social.
Le choix entre les deux statuts voire le cumul n’obéit pas un dogme mais dépend des caractéristiques de la société, du souhait du dirigeant et de l’activité exercée.
Il convient de faire preuve de bon sens et de cohérence dans le choix du statut.
Par Olivier COSTA, Avocat Associé.