Santé au travail des dirigeants d’entreprise : un guide pour les soutenir.

Le mot entrepreneur est souvent synonyme dans l’imaginaire collectif de réussite, de richesse, de puissance, de dynamisme… Or il existe une autre image de l’entrepreneur, malheureusement sous estimée, celle du dirigeant de TPE-PME en souffrance du fait d’une trop forte pression, du fait d’un sentiment de solitude face aux charges inhérentes à la gestion d’une entreprise, du fait de la faillite de son entreprise… Parfois cette souffrance, encore mal appréhendée en France, peut mener un dirigeant au suicide.
C’est pour lutter contre ce fléau sournois qu’un collectif de professionnels en lien avec ces dirigeants en souffrance a écrit l’ouvrage "La souffrance de l’entrepreneur : comprendre pour agir et prévenir le suicide" aux éditions Presse de l’Ehesp.

Alors que depuis de nombreuses années, la souffrance au travail est prise en compte et que des actions sont menées pour préserver les salariés, les entrepreneurs sont les grands oubliés de cette politique publique.
Cette souffrance qui peut parfois mener jusqu’au suicide du dirigeant est très peu étudiée et prise en compte.

C’est ainsi que des femmes et des hommes, de part leur fonction au sein des professions du droit, du chiffre, de la santé…, en contact quotidien et direct avec ces dirigeants en souffrance se sont spontanément mis en action pour leur venir en aide et leur proposer des solutions.

Preuve de cette prise de conscience, la récente mise en place du portail du Rebond des entrepreneurs qui regroupe les 6 associations suivantes : Apesa France, 60.000 rebonds, Re-créer, Second souffle, SOS Entrepreneurs et l’Observatoire Amarok [1]. Ces associations oeuvrent de façon concertées pour permettre aux chefs d’entreprise qui auraient connu l’échec de trouver les ressources pour rebondir et ré-entreprendre… Cette chaîne d’entre aide associative pour les dirigeants intervient avant, pendant et après l’échec.

Le livre "La souffrance de l’entrepreneur : comprendre pour agir et prévenir le suicide", est un outil complémentaire à ces réseaux d’entre-aide. Il apporte une réponse humaine à ces entrepreneurs, hommes et femmes en souffrance.

L’ouvrage a été écrit par trois professionnels dont la diversité de profil est la preuve qu’un large public se sent concerné par cette problématique et qu’il existe une véritable volonté de lutter contre la souffrance des chefs d’entreprise.
Ces auteurs les voici :
- Marc Binnié est greffier associé du tribunal de commerce de Saintes (17), co-fondateur du dispositif d’aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aiguë (APESA) et Président de l’association APESA France.
- Jean-Luc Douillard, est psychologue clinicien au CH de Saintonge (17), coordinateur du Programme régional de santé Promotion santé mentale et prévention du suicide sud 17 et co-initiateur du dispositif APESA.
- Marick Fèvre est responsable prévention et partenariats, MBA Mutuelle et présidente de l’IREPS Bretagne.

Ce livre aborde avec justesse le quotidien de chefs d’entreprise. Au travers de nombreux témoignages, il propose des pistes de réflexions et d’actions pour aider ces derniers ainsi que leur entourage à prendre conscience des risques auxquels ils sont confrontés afin de mieux les prévenir.

Cet ouvrage est un véritable manuel pour agir en amont de toute crise et assurer un après au dirigeant tant sur le plan moral que professionnel.

Entretien avec Marc Binnié co-auteur du livre "La souffrance de l’entrepreneur : comprendre pour agir et prévenir le suicide".

Pourquoi pensez-vous que votre livre est nécessaire ?

Le récent suicide du dirigeant de l’entreprise « Indiscrète » souligne hélas combien il était à mon sens important d’écrire ce livre et de rassembler ces auteurs d’horizons divers. Il faut rappeler, que la souffrance au travail concerne aussi bien les entrepreneurs que les salariés, que le regard sur l’échec doit changer, et aider les entrepreneurs à être vigilants et à se protéger… parfois d’eux-mêmes.
J’espère que ce livre pourra éclairer, afin que les idées noires ne rencontrent plus des idées fausses sur le risque suicidaire de l’entrepreneur.

JPEG - 96.3 ko
Marc Binnié.

Quel point fort, s’il ne fallait en retenir qu’un, souhaitez-vous mettre en avant dans ce livre ?

Ce livre démontre je crois que le problème terrible et dévastateur du suicide d’un entrepreneur ruiné n’est pas une fatalité, qu’il y a un combat collectif à mener, et que de manière assez simple, il est rapidement possible de devenir une sentinelle avertie capable de reconnaitre cette souffrance et d’orienter vers des psychologues en alerte prêts à les prendre en charge. Derrière toute entreprise et ses difficultés, il y a toujours un homme ou une femme, qui ont eux aussi leurs difficultés propres, tout simplement humaines.

A qui le destinez-vous ?

Tout d’abord aux chefs d’entreprises afin qu’ils sachent que leur souffrance est reconnue et qu’il peuvent trouver de l’aide, à leurs organisations professionnelles ensuite afin qu’elles s’associent le cas échéant à la démarche d’Apesa et mettent en œuvre des outils expliquant les dispositifs de traitement des difficultés des entreprises et enfin à tous les professionnels, très nombreux, banquiers, experts-comptables, avocats, juges, mandataires et administrateurs judiciaires, greffiers des tribunaux de commerce, représentants des chambres consulaires…qui croisent au quotidien des entrepreneurs en difficulté et sont désarmés face à la souffrance aiguë qu’ils traversent.

La souffrance de l’entrepreneur : comprendre pour agir et prévenir le suicide.
Editeur : Presses de l’EHESP ;
ISBN : 978-2-8109-0672-7
Prix : 17 Euros.

Rédaction du site des Experts de l’entreprise.


Notes

[1Depuis 2009, l’observatoire Amarok publie des études, fournit des chiffres sur l’importance des mesures préventives vis-à-vis de la souffrance des entrepreneurs. Il a même mis en place un dispositif d’écoute téléphonique pour prévenir les risques de burn-out. Ce dispositif a été testé par la fédération française du bâtiment, la confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiments, par l’ordre des Experts-comptable, par la chambre d’agriculture.